Les « Effractions » de Pierre Péju

Le nouveau roman de Pierre Péju est un recueil de trois nouvelles. Chacune nous divulgue une « Effraction » originale.

La première nous raconte les aventures d’un jeune en galère. Il nous montre des talents de piètre braqueur pour devenir un artiste contrarié au contact d’une plasticienne de renom. Cette nouvelle littéraire commence par un polar et finit dans le délire d’une performance comme l’artiste pariétal Miquel Barcelo les adore. Nous aussi.

Qui n’a pas rêvé de se transformer en James Bond par un hasard extraordinaire. Il traverserait ainsi les chausses trappes semées sur sa route par un adversaire impitoyable. Et devinez quoi ? Il s’en sortirait avec une facilité déconcertante grâce à la complicité d’une espionne aussi jolie que mystérieuse. C’est l’aventure qui arrive à notre héros dans les rues de Tunis. Ce romancier qui était censé être en route pour un salon littéraire se retrouve au milieu d’un traquenard improbable. Délirant mais magnifique.

La troisième nouvelle est encore plus inquiétante. Elle tourne autour de la mort. Comme la Suisse en offre la possibilité, son héros veut choisir la date de sa mort. C’est une idée d’intello… D’ailleurs, il continue sa vie d’artiste et tout va bien.  Mais quand l’heure arrive…il retrouve son amour de jeunesse et voudrait reculer le moment fatidique… Ils sont en bord de mer et c’est merveilleux…

Dans ce roman, Pierre Péju nous raconte que la vie ne vaut la peine d’être vécue que si on la transgresse dans son quotidien, en commettant des Effractions.

 Claude Muller

Le vertige des rêves

Quel plaisir de trouver un roman de l’ami Yves Ballu dans la pile de bouquins reçue pendant ce dernier confinement. Et pas n’importe quel livre, un roman de la meilleure cuvée. Jugez-en plutôt : « La possibilité du vide » (Editions Glénat) nous emporte à la rencontre d’un groupe de jeunes alpinistes s’entraînant le dimanche sur les parois abruptes de Fontainebleau. Les « exploits » de ces novices leurs donnent des ailes. Ils évoluent dans des voies de plus en plus ardues, cotées 4 plus, voire 5…. Tels des pros, ils se mesurent à la roche sous les yeux de leurs admirateurs, restés aux pieds des falaises. Et bien sûr, les accidents ne manquent pas. L’intrigue se noue entre la montagne, un chirurgien, une infirmière et Yann, un patient atteint par un cancer de la prostate. Qui va gagner ? L’alpinisme serait-elle une thérapie ? De qui est amoureuse la séduisante soignante ? La maladie sera-t-elle la plus forte ?

Dans une belle langue, Yves Ballu manie avec maestria le suspense. D’autant que Yann s’est mis en tête de se lancer, en solo, dans les voies les plus prestigieuses des Alpes. C’est pour l’auteur l’occasion de nous raconter d’extraordinaires scènes d’escalade. Au son des concertos de Bach qu’il affectionne particulièrement, nous gravissons les plus belles montagnes. Dans un monologue savoureux, Yann va nous faire vivre des ascensions mythiques, comme si nous y étions. De prises en prises, nous grimpons la Verte, les Drus et de nombreux couloirs légendaires des Alpes. Les dièdres, les couloirs, les surplombs se dessinent dans nos rêves. C’est une aventure fabuleuse. Mais, c’est dans les Calanques que ce roman va grimper jusqu’à son paroxysme. C’est sur ces roches calcaires que le suspense va monter en pression… Je ne vous divulguerai pas la fin, mais sachez quand même qu’elle est vertigineuse. 
Claude Muller

Frink & Freud, une histoire rocambolesque



Vous avez aimé « L’œil de la nuit », le roman de Pierre Péju paru chez Gallimard, vous allez adorer « Frink & Freud, le patient américain » paru aux éditions Casterman.



C’est un roman graphique de Lionel Richerand et Pierre Péju.



Ces deux œuvres racontent la même histoire rocambolesque, celle des aventures du docteur Freud en Amérique et de son disciple, un certain docteur Frink.



L’Américain servira de guide au célèbre psychanalyste Autrichien dans son voyage vers le nouveau Monde. Mais l’un est un roman passionnant comme seul Pierre Péju en a le secret et l’autre est une BD croquée au crayon et de belle manière par le maître de la caricature Lionel Richerand et dialoguée par Pierre Péju, lui-même.



Peu importe que vous choisissiez de vous plonger dans l’une ou l’autre de ses œuvres, vous aurez le même plaisir à découvrir par le menu cette histoire croustillante et peu connue de la psychanalyse. Avec l’une, votre imagination prendra le pouvoir sur vos sens et avec l’autre, les caricatures vous guideront vers votre imaginaire. Simplement, ce sont peut-être deux publics différents qui pourront ainsi avoir accès à cette histoire improbable.

Claude Muller

Un Noël littéraire

Quitte à passer un Noël au coin du feu (Covid oblige), je vous propose qu’il devienne littéraire. La lecture devrait faire passer la pilule du confinement. Nul besoin de masque, ni de gel hydroalcoolique pour se plonger dans de bons bouquins. Il faut simplement bien les choisir. Pour vous aider, je vous propose ma sélection. Elle est subjective, iconoclaste et même peut-être originale, c’est ce qui fait son charme.

Je vous suggère de commencer par un polar de la meilleure espèce : L’Enigme de la chambre 622 de Joël Dicker (Editions de Falois). C’est un bestseller, ce qui ne gâche rien. Ce roman est époustouflant tant par son histoire (elle se déroule en Suisse) que par sa forme (elle est déroutante). Vous voyagerez dans des lieux prestigieux, entre un palace de la station de Verbier et le quartier des banques à Genève. Ce sont les décors d’un jeu de pouvoir démoniaque auquel s’ajoute des personnages rocambolesques, une histoire d’amour pleine de rebondissements et au milieu, bien sûr, un crime inexpliqué. De quoi passer de bon moment sous le sapin.

Puis, vous partirez en montagne avec un petit retour en arrière en revisitant les œuvres de Roger Canac . Il vient de nous quitter. Je vous conseille son « Gaspard de la Meije ». Le personnage est très fort.

Ensuite, vous vous plongerez dans les œuvres de l’ami Bernard Amy. Son dernier livre « Ceux qui vont en montagnes » (Editions PUG) clôt une série de réflexions sur l’approche du risque.

Vous retrouverez aussi avec bonheur ses textes parues sous le titre « L’Alpiniste » dans lequel Bernard nous prouve que la « nouvelle littéraire » excelle à raconter la montagne. Sa description de l’ascension nocturne de l’Aiguille Verte sous la lune est l’un des plus beaux textes qu’il m’ait été donné de rencontrer. Est-ce la Verte qui lui a donné ces mots ?

La lecture d’Impossible d’Erri de Luca (Editions Gallimard) sera aussi un moment fort de la littérature. Nous sommes sur un sentier escarpé des Dolomites, une rencontre fortuite se produit… C’est le début d’un scenario « impossible » dans lequel le passé révolutionnaire du narrateur resurgit. C’est surtout le prétexte à nous raconter son rapport à la montagne et son besoin de solitude là-haut…


Dans le genre patrimonial, vous irez « Au Pays de Séchilienne, d’un siècle à l’autre. » de Gilles Rey, publié par Les Amis de l’Histoire du Pays Vizillois.  Ce livre, que dis-je ce beau pavé très documenté, raconte le pays de la Romanche au fil du temps. Grâce à une très riche iconographie son auteur nous fait revivre avec passion cette vallée dans laquelle ont fleuri des forges, des métiers à tisser, des scieries, et surtout une industrie omniprésente avec ses complexes hydro électrique. Gilles Rey nous offre ici un panorama complet de ce pays très « riche », mais bien mal mené par le temps.


Pour finir cette revue littéraire, je vous propose deux coups de cœur. Alpicimes par les DiVertiCimes (Editions Glénat) est un véritable bijou dans lequel chaque photo, chaque situation, chaque lumière, chaque couleur, chaque texte, chaque page cueillera votre imagination à sa source.


Par la fenêtre de Nicole Giroud (Editions Les Escales) est une belle surprise littéraire. Ce roman vous fera voyager depuis le Jura jusqu’au Brésil en passant par la Suisse et l’Italie…pour aller voir la mer.


Je vous souhaite un joyeux Noël empli de belles lettres…
Claude Muller

Le livre qui sauve Amandine

Le rêve d’Amandine, l’héroïne de Nicole Giroud dans son roman « Par la fenêtre » (Edition Les Escales), est d’aller voir la mer. Mais, elle est très loin… Il faut vous dire qu’Amandine est une fille de paysan très pauvre et que ses parents l’ont mariée à un homme violent…en échange de 3 vaches. C’est très mal parti pour aller voir la mer…

Mais, comme Amandine est douée, son institutrice lui donne très tôt le gout des livres. Alors, elle va voyager toute sa vie à travers ses lectures. Et comme elle possède aussi de réels talents de conteuse, elle va emmener tous ses auditoires dans des histoires fantastiques. Elles se passent au Brésil chez un riche planteur de café dans une famille tout aussi cabossée que la sienne.

Le roman de Nicole Giroud nous surprend « Par la fenêtre » à la fin de la vie d’Amandine, en Suisse dans une maison de retraite vieillotte. Les pensionnaires sont captivés par les aventures fantastiques des héros qu’invente pour eux Amandine, le soir venu.

Mais, c’est encore loin la mer ? Vous le saurez à la fin du livre, mais avant il faut que je vous raconte combien ce roman m’a captivé. Il vous fera naviguer tout le temps entre la dure réalité du quotidien d’Amandine dans son village et la vie fantastique de ses héros imaginaires, si bien que quelques fois vous vous perdrez entre les lignes de ce conte extraordinaire. Mais qu’importe, vous verrez que l’on navigue très bien à vue dans ce voyage de mots. C’est même pour cela que ce roman au long court est captivant. Il est écrit dans un style si limpide qu’il se glissera tout seul dans vos rêves entre les vagues de votre couette.

Claude Muller

L’œil de la nuit de Pierre Péju

Un café littéraire avec Pierre Péju est toujours un évènement. D’abord parce que l’auteur de la Petite Chartreuse est un formidable conteur, ensuite parce que chacun de ses nouveaux romans est une extraordinaire aventure. « L’œil de la nuit » n’échappe pas à cette règle, ce livre nous raconte un « voyage rocambolesque ».

« L’œil de la nuit », tout un voyage

Ce roman de Pierre Péju, paru aux éditions Gallimard, nous raconte les aventures d’Horace W.Frink, un américain « intranquille ». Il devient psychanalyste à New York et va courir le monde pour assouvir ses pulsions et rencontrer son maitre Sigmund Freud. Pierre Péju nous invite à le suivre dans ses aventures rocambolesques en nous racontant son voyage.

Voyage dans les lignes de ce beau texte, tout d’abord. Son écriture limpide coule entre les mots pour nous emporter dans des aventures extraordinaires.

Voyage dans le monde ensuite. Horace W.Frink commence sa vie sur le campus de Boston, puis s’installe dans différents quartiers de New York. Il nous entraine ensuite en bateau jusqu’à Paris. Il séjourne à Montparnasse et de là, il se rend à Vienne en Autriche. Retour à New York pour finir sa vie dans les forêts du Vermont. Chaque ville, chaque étape, chaque espace de ce périple donne l’occasion à Pierre Péju de nous décrire ces paysages avec une infinie tendresse.

Voyage à la découverte de la psychanalyse. Elle sert de prétexte à ce roman. Notamment les rencontres avec Sigmund Freud qui en constituent le fil conducteur. Elles vont guider la vie tumultueuse de notre héros.

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Pierre Péju

Mais le sujet principal de ce livre est un voyage initiatique à l’amour, tous les amours. Maternel mais contrarié avec sa mère tout d’abord, puis complice mais plat avec sa femme. Horace vivra un amour fou, passionnel et charnel avec sa maitresse. Il finira sa vie avec un amour de jeunesse et de raison…

Vous l’avez compris, L’œil de la nuit est un livre riche de mots, d’actions, de paysages, de rencontres et surtout d’idées… Seul un texte de Pierre Péju pouvait nous tenir en haleine entre les lignes de ce formidable roman. Je l’ai lu comme un parcours initiatique, sans hâte, sans stress mais avec détermination. Je crois que depuis que je l’ai refermé, je l’ai relu cinq fois dans ma tête, un peu comme si j’avais suivi une « psychanalyse » avec cet œuvre. Merci Pierre.

Claude Muller

Un voyage dans l’astronomie sombre : celle des trous noirs et de la matière noire

Gérard Muller continue à explorer toutes les possibilités offertes par le roman policier scientifique. Après « L’âme de la fontaine étourdie », qui a emmené ses lecteurs dans les arcanes de l’âme humaine et de la physique quantique, il propose avec son nouveau roman, « Le soleil noir de Tenerife » (publié aux éditions Lazare et Capucine), un voyage dans le domaine des trous noirs et de la matière noire. Deux phénomènes qui restent très mystérieux pour les astrophysiciens.

Les trous noirs, ces concentrations de matière dont rien ne sort, pas même la lumière, font fantasmer l’humanité depuis qu’Einstein en a découvert le concept. Présents au centre de chaque galaxie, ils peuvent posséder la masse de plusieurs millions de soleils, et attirent toute matière qui aurait l’audace de s’en approcher. Ils présentent en outre d’autres singularités comme une dilatation du temps inimaginable et peuvent même, selon Stephen Hawking, permettre un passage vers d’autres univers.

La matière noire, appelée ainsi car elle est invisible par tous nos détecteurs hertziens, représente plus de six fois la masse visible dans l’univers. Aujourd’hui, personne n’en connaît l’origine ni la composition. Nous en voyons les effets tous les jours dans le cosmos, grâce aux lentilles gravitationnelles et à l’étude de la stabilité des galaxies, mais la communauté scientifique se perd en conjectures sur les particules qui la composent.

Afin de permettre au lecteur d’explorer ces concepts, avec une approche romanesque, Gérard Muller a imaginé le scénario suivant : Fernando, spécialiste du soleil, scrute son astre favori tous les jours à l’aide du grand télescope de Tenerife (observatoire du Teide). Un beau matin, il y aperçoit une tache noire en son centre. Après avoir vérifié le bon fonctionnement de son instrument, il doit se rendre à l’évidence : la tâche est bel et bien présente. S’agit-il d’un astéroïde, d’un satellite, d’un trou noir ou de la matière noire ?

Il a alors l’intuition qu’il pourrait s’agir d’une manifestation de la matière noire. Avec sa stagiaire Monica, il contacte l’observatoire d’Hawaï qui confirme bien la réalité de cette tache. Les Américains ne croient pas du tout à de la matière noire, et toutes les observations semblent bien infirmer cette hypothèse. Toutefois, ils vont tenter de mettre l’équipe canarienne sur de fausses pistes, ce qui renforce l’idée qu’il pourrait s’agir d’un phénomène aussi mystérieux qu’important.

Fernando fait alors venir son amant qui est aussi astrophysicien et, à l’aide d’un soi-disant thésard chinois, ils vont s’évertuer à trouver l’origine de cette tâche. Au bout de quelques semaines, le Chinois donne à ses collègues la solution qui implique des considérations politiques et stratégiques. Il leur propose alors un deal, en échange de leur silence.

L’équipe de Fernando accepte le deal après quelques hésitations, et en réponse, le pseudo-thésard chinois, en fait un des pontes de l’astrophysique de Pékin, leur livre une partie de ses travaux : à savoir que les trous noirs seraient beaucoup plus massifs que prévu et qu’ils renfermeraient en fait la matière noire que tout le monde recherche. Fernando continue à avoir des doutes sur cette hypothèse (qui voudrait que les galaxies s’écroulent sur leur trou noir central), et va émettre l’hypothèse qu’en fait, la matière noire viendrait d’autres univers qui déverseraient leur matière dans les trous noirs (qui seraient des ponts entre les différents univers. Hypothèse Stephen Hawking). Cette hypothèse est-elle vérifiée ? Le lecteur le saura à la fin du livre au style fluide, vivant et facile à lire. Une façon amusante d’entrer dans le monde de l’astrophysique en utilisant les techniques du roman policier.

Claude Muller

Le 43ème Café Littéraire du Grésivaudan : « Berlioz » par Bruno Messina

Bruno Messina est un passionné. Directeur du Festival Berlioz, il est avant tout un musicien. Mais c’est surtout un orateur formidable, admirateur de l’œuvre d’Hector Berlioz. Dans son livre, Berlioz paru aux éditions Actes Sud, il nous brosse le portrait de l’homme, de l’aventurier, du tortueux et du génial compositeur qui nous a légué des opéras, cinq symphonies et de très nombreuses autres musiques de chambre. Cet été, pour les deux semaines du festival, Bruno Messina a programmé les plus grands chefs d’orchestre berlioziens. Fin août, quelques 1600 musiciens se succéderont sur la scène du festival pour nous proposer ces chefs d’œuvre romantiques. Et pour fêter dignement les 150 ans de la mort de ce compositeur, tout commencera par une fête grandiose dans les rues de la Côte Saint André, comme Berlioz en rêvait dans sa jeunesse. Un cheval de Troie de six mètres de haut mènera le cortège de la ville jusqu’au Château Louis XI dans lequel sera joué « Les Troyens », sa dernière grande œuvre. C’est au cours du café littéraire du 28 mai 2019 à 18h 30 à la Médiathèque de Crolles que Bruno Messina nous racontera la vie tumultueuse de Berlioz allant de Paris à Londres et de Moscou à Rome. Voir mon Blog. Mais savez-vous que tout a commencé dans le Grésivaudan à la recherche de sa muse…
Claude Muller

Affiche café